À Fizi, dans la province du Sud-Kivu, les associations villageoises d’épargne et de crédit (AVÉC) se sont imposées comme un pilier essentiel de l’autonomisation économique des femmes. Face aux défis structurels liés à l’accès au financement et aux services bancaires traditionnels, ces groupes informels, composés majoritairement de mères de famille, artisans et commerçantes, ont développé une culture locale d’épargne collective et de micro-crédit. Grâce à des cotisations hebdomadaires et à des mécanismes de solidarité renforcée, elles permettent à des centaines de femmes de financer leurs petits projets — agriculture, transformation alimentaire, vente de produits artisanaux — sans recourir à des prêteurs informels aux taux exorbitants.
L’accompagnement technique et institutionnel fourni par les organisations locales et les ONG partenaires a été déterminant dans la structuration de ces AVÉC. Des formations régulières en gestion financière, en comptabilité simplifiée, en leadership et en droit des femmes ont été dispensées, renforçant la transparence et la responsabilité au sein des comités de gestion. Ces interventions ont permis de réduire les conflits internes, d’améliorer la remboursabilité des crédits et de favoriser la reprise d’activités génératrices de revenus, même dans les zones les plus reculées où l’État est peu présent.
L’impact social dépasse largement le volet économique. Les femmes accompagnées gagnent en confiance en elles, prennent davantage de place dans les décisions familiales et communautaires, et deviennent des modèles pour les jeunes filles. De nombreuses AVÉC ont désormais initié des programmes d’éducation pour les enfants, des campagnes de sensibilisation sur la santé reproductive ou encore des initiatives contre les violences basées sur le genre. Le pouvoir collectif qu’elles acquièrent transforme progressivement les rapports de pouvoir au sein des villages, en faveur d’une société plus équitable.
Pour assurer la pérennité de ce modèle, il est urgent de renforcer les liens entre les AVÉC et les institutions financières formelles, ainsi que d’élargir l’accès aux marchés locaux et régionaux. Les autorités locales, les partenaires techniques et les donateurs doivent continuer à soutenir ces initiatives par des investissements ciblés, des cadres juridiques adaptés et une reconnaissance officielle de leur rôle stratégique dans le développement local. À Fizi, les femmes ne se contentent plus d’attendre : elles épargnent, prêtent, créent et transforment leur communauté — et c’est là leur plus grande force.